Oui, je l'étais ...
La gratitude devrait être notre mode de vie, dans les bons comme dans les mauvais jours, et encore plus dans les jours difficiles. Elle nous apprend à apprécier tous les cadeaux de la vie et la grâce divine. @Brianca O. BUHORO.
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Quelle serait notre attitude si l'on nous disait qu'à telle date, notre ami ou notre proche X mourra ? Nous les croyons éternels jusqu'à ce qu'ils s'en aillent. Nous les voyons ordinaires jusqu'à ce qu'ils ne soient plus là. Nous pensons que nous avons demain pour profiter de la vie avec eux, jusqu'à ce que nous réalisions qu'ils ne feront plus jamais partie de nos plans, car ils sont partis !
Ibrahim, un souffle fragile, une vie précieuse – c’est ce que j’ai pensé en voyant ce cortège qui t’accompagnait, endroit après endroit, pour les derniers hommages…
Vendredi 6 juin 2025, mon collègue Ibrahim a rendu l'âme. Je vous raconte. C'était une journée particulière, un ennui intérieur indescriptible me gagnait. Je me suis dit que cela devait être lié à ma charge de travail, à tous ces petits détails que j'étais censée terminer, mais que les urgences du moment m'avaient empêchée d’achever...
Mais c'était plus profond que ça. C'était l'âme d'Ibrahim qui se détachait peu à peu de ce monde, soufflant en silence une tristesse d'adieu...
Peut-être était-ce la douleur du déchirement, ce départ précipité par la maladie, qui essayait de se traduire en un vent léger mais chargé de tristesse pour les jours à venir.
J’avais essayé une séance photo, mais l’ennui persistait. Prendre des photos me met toujours de bonne humeur, mais pas ce jour-là. J’ai tenté de faire des vidéos, mais ce chagrin inouï s’accrochait à mon âme. Et bien sûr, j’ai pleuré un peu.
Le soir, en regardant les différentes vidéos que j’avais faites ce jour-là, mon mari m’a dit : "Tu as pleuré." Oui, j’avais pleuré. On a ri un peu.
Mais il y avait toujours ce fantôme qui me collait à la peau, m’interdisant d’être joyeuse.
J’avais du mal à dormir. J’ai écrit, j’ai monté mes vidéos, j’ai fait quelques designs, et je me suis épuisée de fatigue. Puis, j’ai dormi. Et pendant ce temps-là, Ibrahim rendait l’âme... Ibrahim quittait ce monde...
Le samedi matin, vers 9 h, alors que je dormais encore, mon mari me serre dans ses bras et me présente ses condoléances. Je suis surprise. Je pense qu'il a vu quelque chose sur les réseaux sociaux qui pourrait m'affecter, mais je n’imagine pas un seul instant que cela ait un lien avec une personne qui m'est chère.
Je lui dis merci, puis demande directement pourquoi ? Pour qui ?
Il me répond : Ibrahim, Ibrahim, il est parti.
Je refuse d’y croire. Il y a à peine une semaine, qu’une amie m’a dit qu’il était malade, alors que nous partagions un repas. Comment cela pourrait-il être vrai ? J’hésite, je lui demande : “D’où tu sors ça ? C’est moi qui t’ai dit qu’il était malade, comment c’est toi qui me dit qu’il est mort ? Montre”.
Ce que je refuse à croire est en fait un fait, Ibrahim est bel et bien parti. Je vois un communiqué, d’une source sûre qui annonce la triste nouvelle, … pour moi, c’est juste une goutte de trop. Cette année n’a pas été facile, depuis le début, des défis se sont succédés et la mort de Ibrahim ? C’est juste une goutte de trop !
Mon week-end était gâché. J’ai senti une sorte de souffle brûlant souffler dans mon cœur, une douleur si intense que j’ai nettoyé à fond la maison, alors que ma fille l'avait déjà fait. J’avais besoin de canaliser cette douleur brûlante qui me consumait de l’intérieur.
J’étais triste, brisée. J’espérais que plus je me fatiguais, plus mes émotions se tasseront. Dimanche, lundi, mardi, j’aillais plus ou moins mieux. Entre le déni et le slogan « c’est la vie, ça arrive » et puis ce jour est arrivé, ce moment du grand adieu...
Ce jour encore, comme en 2024 quand mes deux proches avaient perdu successivement leurs parents, j’ai réalisé à quel point la vie est fragile et précieuse. Il suffit de peu pour que le souffle s’éteigne, et c'est la fin.
Un souffle fragile, une vie précieuse, … S’il fallait que j’écrive mon dernier message à ibrahim, ce serait de lui dire : « ton souffle a été fragile, mais ta vie si précieuse » ; mais je n’ai pas pu…
Je voulais prendre un stylo pour écrire un mot d'adieu, mais mes mains se sont rebellées. J’étais crispée. Je ne parvenais pas, … Je voyais le visage souriant de Ibrahim de cette cours du bureau où il prenait la parole tous les matins où il était présent, …
Et pendant que nous attendions son corps (ces mots me brisent : "son corps", comme s'il ne s'agissait plus de lui), je repensais à nos moments ensemble, aux défis professionnels relevés, à ces échanges courts mais si intenses et significatifs.
Ibrahim était un homme intègre, qui n'avait pas peur de dire la vérité en face, mais aussi très drôle. Il fallait éviter lui mettre en colère, mais il pardonnait aussi vite et passer à autre chose.
Je lui disais toujours : "Il me suffit de te voir pour commencer à rire."
Et ce que je garde de lui aujourd’hui, c’est son humour, ses blagues en réunion, sa bonne humeur, son petit rire.
Je me rappelle encore que ça m’a pris un an pour apprendre à dire Ibrahim correctement. Je l’appelais toujours Brahim, et il insistait : "Ajoute le 'I' en majuscule, sinon ce n’est pas moi."
Quand il mettait du temps à répondre à mes mails et que je lui relançais en personne, il souriait et me disait : "Je pensais que tu parlais à Brahim. Je croyais que Brahim t'avait déjà répondu. Mais puisque tu t’adresses à Ibrahim, considère que c'est réglé."
Ibrahim !
Je voudrais dire que c'est trop tôt pour ton départ, mais que sais-je vraiment du temps ? Quelle notion ai-je du temps ?
Si Dieu l’a permis, c’est que c’était le bon moment.
Ni trop tôt, ni trop tard, juste au bon instant, selon Son plan Parfait.
Mais comment expliquer, face à cette douleur, que c'était "le moment" pour que tu meures, Ibrahim ?
Je suis triste, mais Dieu, qui t’a donné la vie, t’a repris, et je suis reconnaissante d’avoir eu la chance de faire partie de ton petit voyage sur terre.
Reconnaissante d’avoir croisé ta route, de t’avoir connu, d’avoir partagé une partie de ma vie professionnelle à tes côtés.
Ce choc me rappelle une chose essentielle : nous n’avons pas le temps. Notre vie, c'est maintenant.
La vie est trop courte pour être remplie de rancune, de jalousie, de haine, et de tous ces sentiments négatifs qui nous consument et empoisonnent la vie des autres.
Quand la vie se brise, plus rien n’a d’importance : ni nos urgences, ni nos priorités, ni nos soucis, ni nos projets.
Nous devons prendre soin de nous, vivre pleinement, et nous concentrer sur la mission que Dieu nous donne. Nous devons prendre soin de ceux qui nous sont chers, c’est juste un petit moment avec eux, …parce qu’au fond, la vie n’est qu’un petit voyage, chaque descend du train lorsqu’il arrive à sa gare.
Nous n'avons pas assez de temps. Seulement le présent compte. Nous devons choisir nos batailles, et ne lutter que pour celles qui en valent la peine, sans perdre notre énergie dans des combats inutiles.
Ibrahim, merci pour ta vie, et merci pour la sagesse que ton départ apporte. Dans l'espoir de la Résurrection, que puisse ton âme trouver la paix éternelle.
Seigneur, ajoute les couverts à ta table et accueille ton serviteur.
Prends soin de sa famille et sois la consolation de tous ceux qui le pleurent.
Amen.
Photo crédit : Tony Sebastien
Ecrire c'est le passage !
La gratitude devrait être notre mode de vie, dans les bons comme dans les mauvais jours, et encore plus dans les jours difficiles. Elle nous apprend à apprécier tous les cadeaux de la vie et la grâce divine. @Brianca O. BUHORO.
Goma, nous luttons avec notre impuissance face à la situation, nous luttons pour survivre, nous luttons pour ne pas crouler sous la peur ou la rage. Nous luttons, chacun dans son coin, pour transmettre la force et l'espoir à ceux qui nous sont chers. 27 janvier 2025.